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Fumer TUE, alors permis ou interdit ?

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MrQuestion
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Très cher Rav Wattenberg,

Encore aujourd'hui un nombre important de jeunes se mettent à fumer même dans la sphère des yechivots. Pourtant on sait de façon certaine que cela nuit gravement à la santé.

Comment se fait-il qu'il n'y a pas de protestations et d'alertes de rabanim et roch yechiva pour alerter et interdire une telle chose alors que ne pas prendre soin de sa santé est issour de la torah ?
Pourquoi ce sujet n'est pas rapporté par les décisionnaires pour dire que c'est strictement interdit ?
Comment se fait-il qu'on trouve tant de grands rabanims qui fument ?

Merci de m'expliquer car je comprends pas cette contradiction.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
Citation:
Encore aujourd'hui un nombre important de jeunes se mettent à fumer même dans la sphère des yechivots. Pourtant on sait de façon certaine que cela nuit gravement à la santé.
Comment se fait-il qu'il n'y a pas de protestations et d'alertes de rabanim et roch yechiva pour alerter et interdire une telle chose alors que ne pas prendre soin de sa santé est issour de la torah ?
Pourquoi ce sujet n'est pas rapporté par les décisionnaires pour dire que c'est strictement interdit ?
Comment se fait-il qu'on trouve tant de grands rabanims qui fument ?
Merci de m'expliquer car je comprends pas cette contradiction.


Il y a certes probablement plus de fumeurs dans les yeshivot (proportionnellement) qu’ailleurs, mais si vous aviez vu l’état des lieux il y a 30 ou 40 ans…

C’est simple, quand j’étais à la yeshiva en Israël, sur 900 élèves, on ne devait pas être beaucoup plus de 3% à ne jamais fumer.

Il y a eu une évolution ; dans les années 90, ça fumait toujours autant en Israël, mais aux Etats-Unis, c’était déjà « mal vu ».
Un ba’hour Yeshiva fumeur avait plus de mal à se marier (alors qu’en Israël ça n’était absolument pas un critère, tant tout le monde fumait).

Par contre, depuis à peu près 15-20 ans, j’ai entendu dire qu’il y avait une régression (ou plutôt une progression) sur ce domaine dans les yeshivot israéliennes, suite aux vitupérations de certains poskim.
Le mot d’ordre était qu’il est « autorisé de fumer pour les fumeurs, mais interdit de commencer ».

Il n’était pas respecté parfaitement, mais au moins quelques timides commençaient à se demander si ça valait bien la peine de se mettre à fumer. (Ajoutez à ça l’augmentation du prix des cigarettes…)

Pourquoi ces poskim (se basant sur les rapports médicaux et le nombre de malades à cause de la cigarette) ont commencé à se faire entendre seulement il y a 15-20 ans ? Bonne question. (je ne pense pas qu’il faille y voir un rapport avec l’hôpital des Quinze-Vingts.)

Pendant longtemps la rengaine était « Shomer Petaïm hashem » en se basant sur la Gmara Shabbat (129b) et Nida (31a) qui utilise ce verset (de Tehilim §116, 6) indiquant que D.ieu protège les benêts, pour dire que celui qui par sa bêtise ne prend pas garde à un danger, serait protégé par D.ieu.

Seulement le Talmud n’utilise cette expression que dans le cas d’un danger non clairement établi, un danger qui ne saute pas aux yeux, un danger supposé mais non prouvé pour l’inculte (par exemple le danger de la Katlanit), mais pour ce qui est du tabac, le danger est avéré et scientifiquement prouvé.

Cependant, cet argument qui semble fallacieux est pourtant présenté par Rav Moshé Feinstein (Igrot Moshé YD II, §49 et HM II, §76).

Toutefois, beaucoup se sont opposés à cette vue en raison de la distinction citée plus haut, selon laquelle on ne pourra pas appliquer le principe de Shomer Petaïm Hashem dans ce cas.

Voir

Tsits Eliezer (XV, §39),

‘Houkei ‘Haim (I, OH §69),

Rivevot Ephraïm (VIII, §586),

Tshouvot Vehanhagot (III, §354),

Mishné Halakhot (IX, §161),

Az Nidberou (IX, §65),

Assé lekha Rav (IX, §28)
.


De plus, on ne dit Shomer Petaïm Hashem que lorsque l’inquiétude est faible, qu’il n’y a que très peu de cas graves (Shout A’hiezer I, §23), ce qui n’est pas le cas lorsqu’on considère les ravages du tabac.

Le Az Nidberou (op cit) ajoute encore que le Troumat Hadeshen (I, §211) écrit qu’il n’est pas dit que la protection divine s’applique aussi à ceux qui sont réellement conscients du danger…
[à mettre en regard de ce qu’a dit Rav Avigdor Miller, cité par le Rivevot Ephraïm (II, §55) : pour celui qui est convaincu du danger de la cigarette, c’est assurément un Issour de fumer.]

Bref, cette position du Rav Feinstein est largement contredite.

D’aucuns pensent qu’il se basait sur des rapports médicaux anciens, à l’époque où le danger n’était pas si clairement établi.

Il se trouve que son propre fils et meilleur représentant, R. Dovid Feinstein (Kovets Latorah Vehoraa 5772, p.67), disait que son père aurait lui-même interdit de fumer plus catégoriquement s’il avait vu les nouvelles études sur le sujet.


Citation:
Comment se fait-il qu'il n'y a pas de protestations et d'alertes de rabanim et roch yechiva pour alerter et interdire une telle chose alors que ne pas prendre soin de sa santé est issour de la torah
Pourquoi ce sujet n'est pas rapporté par les décisionnaires pour dire que c'est strictement interdit ?


Comment pouvez-vous dire qu’il n’y ait pas eu de réaction des décisionnaires et Rabbanim ?
Il n’y en a certes pas eu assez tôt en quantité, mais de nos jours, les prises de positions ne manquent pas.

Les poskim soulignant un interdit halakhique sont nombreux (et depuis plus longtemps qu’on ne le pense), voyez :

Tsits Eliezer (XV, §39) et (XVII, §21, §22)

Beèr Moshé (VI, §160, 9)

Rivevot Ephraïm (VIII, §586)
(et voir II, §55 au nom de rav Avigdor Miller)

Assé Lekha Rav (I, §42), (II, §1), (III, §18), (VII, §67) et (IX, §28)

Tshouvot Vehanhagot (III, §354) et (IV, §115) –et (I, fin de §316)

Mishberei Yam (§97)

Shout Hashavit (III, p.156)

Likoutei Amarim (Kagan) (§XIII)

Torat Habaït (Kagan) (§4)

Mayim Hahalakha (IV, §44)

‘Houkei ‘Haim (I, o’’h §69) (II, §164)

Zakhor Lemyriam (Kagan) (§10, p.28)

R. Zalman Ne’hemia Goldberg (Peèr Ta’hat Efer, p.52)

R. Dovid Feinstein (Kovets latorah vehoraa 5772 p.67)

Rav BenTsion Aba Shaoul (Or Letsion ‘Hokhma Oumoussar p.221)
pour qui même s’il n’y a pas un Issour vaday, mais Sfeika Deorayta est assour.

R. Yaakov Kamenetsky aussi pour qui c’est un Safek Issour Torah (Shout Divrei ‘Hakhamim -Ginzburg- p.282), mais son fils témoigne dans Making of a Godol (p.1093) qu’à la fin de sa vie, son père pensait que c’était un (vaday) Issour Deorayta.

R. ‘Haim Kanievsky (Sheélat Rav p.92)

Rav ‘Haim Pin’has Scheinberg (A Gadol in Our Midst, p.279)

Rav Wolbe (Peèr Ta’hat Efer, p.49)


Et voir encore Min’hat Its’hak (V, §16)

Shout Its’hak Yeranen (II, YD, §6)



Il est vrai que certains semblent considérer qu’on ne puisse pas utiliser ici le vocable de ‘Aveira’, qu’il serait inapproprié (dans le sens d’un issour défini et répertorié), mais ils reconnaissent tout de même que c’est mauvais et qu’il ne faut pas fumer.

Par exemple :

Mishné Halakhot (IX, §161) et (XVI, §17) (voir aussi XII, §23)

Shevet Halévi (X, §295) [voir aussi (VIII, §251, 6)]

Shout Beit Avi (IV, §9, 3)

Az Nidberou (IX, §65)

Rav Elyashiv
dans Kobets Tshouvot (I§219) [Il est aussi cité dans Shout Knesset Ye’hezkel (II, YD §54) et Shout Divrei ‘hakhamim (Ginzburg) (p.282)]. Cependant dans Vayishma Moshé (p.436), il est plus catégorique.

Igrot Moshé (Y’’D II, §49) et (H’’M II, §18 et §76)

ROY
dans Ye’havé Daat (V, §39) [cependant, sa position est plus catégorique dans son Halikhot Olam (I, p.265)]

R. ‘Haim Palacci dans Tsavaa Me’haim (§15 de la partie écrite) (en invoquant le Bitoul Torah, le ‘hiloul YomTov en cas d’extinction, l’éventuel ‘hiloul Shabbat pour celui qui craquerait, et le manque de Oneg Shabbat pour celui qui souffrirait de ne pouvoir fumer le samedi, avec l’état nerveux engendré, qui est un Issour en soi).

Maharash Abouhav dans son Shout Dvar Shmouel (§156) (pas pour des raisons de santé encore ignorées à son époque, mais en raison du Bitoul Torah engendré, ainsi que du ‘hashash ‘hiloul yomtov par extinction).

‘Hazon Ish cité dans plusieurs sfarim, comme Shmirat Hagouf Vehanefesh (Mavo §6, p.52), Toldot Yaakov (p.69) et ‘Haïm Lelo Ishoun (p.90 en bas).

R. S.Z. Auerbach
dans Nishmat Avraham (O’’H §511, 1) (H’’M §155), Lev Avraham (II, p.17), Assia (V, p.244), Min’hat Shlomo (II, §58, 6) et Halikhot Shlomo (Tfila p.232).

Shout Min’hat Asher (Weiss) (I, §35)


Vous trouverez encore un appel signé par plusieurs rabanim contre la cigarette, réimprimé dans ‘Haïm Lelo Ishoun (p.92), les signataires sont :

Rav Elyashiv,
Rav Steinman,
Rav Moshé Shmouel Shapira,
Rav Lefkovicz ,
Rav Nissim Karélits,
Rav Shmouel Auerbach.



Au même endroit, vous verrez que rav Shlomo Zalman Auerbach a arrêté de fumer lorsqu’on lui a montré dans le journal un article indiquant que fumer pouvait causer un cancer.

Pareil pour Rav Yaakov Kamenetsky (cf. Rabbi Yaakov, p.318). (et voir aussi ‘Hashoukei ‘Hemed Baba Kama daf 94). Sauf qu’il n’en était pas à son premier arrêt (voir Making of a Godol, p.1092).

[Quant au Steipler, Rav Yaakov Israel Kanievsky, grand fumeur en son temps, il se priva de cigarette durant la Shoah (il habitait en Erets Israel depuis 1934), cf. Hasteipler (p.53)]

Il y a une histoire sur le Rabbi de Bobov, R. Bentsion Halberstam, qui fumait un cigare dans la salle d’attente du médecin, ce dernier lui dit que ce n’était pas bon pour sa santé, il le déposa donc dans le cendrier et suivit le médecin dans son cabinet.
Une fois la visite terminée, le Rabbi remet son manteau et se dirige vers la sortie en abandonnant son cigare. Le médecin lui rappelle qu’il oublie là un précieux cigare, et le Rabbi lui répond : « merci, mais je ne fume pas » (Making of a Godol p.1093).

Rav Shakh aussi a arrêté du jour au lendemain, lorsqu’étant à l’hôpital en 1962, le chirurgien lui dit que c’était dangereux pour la santé. ‘Haïm Lelo Ishoun (p.91) et Or’hot ‘Hassideikha (p.73).

Plus tard en 1984 (au mois de Shvat), Rav Shakh avait donné un Shmouess (discours moussarique hebdomadaire) à la Yeshiva (Ponovez -Bnei Brak) interdisant de fumer dans l’enceinte du Beit Hamidrash, celui qui doit absolument fumer devra désormais sortir sur le balcon/terrasse.
Voir Sefer Assia (V, p.261).

[Voir aussi (en page 248) une lettre similaire du Rav Moshé Feinstein datée de 1980 et voir encore Igrot Moshé (H’’M II, §18).]

Ça a été respecté à Ponovez, sauf pour le Seder Shlishi (le seder du soir) où certains se permettaient encore de fumer à l’intérieur en considérant qu’il y a (le soir) assez de place pour s’éloigner des fumeurs.

(Généralement, ils s’arrangeaient pour se mettre proche des fenêtres, surtout dans la Ezrat Nashim –utilisée en beit hamidrash la semaine).

Voir encore :

Tshouvot Vehanhagot (I, §159) (et voir aussi §316)

Shevet Hakehati (I, §332)

Tsits Eliezer (XV, §39) et (XVII, §22)

Maassé ‘Hoshev (III, §20, 10)

R. BenTsion Aba Shaoul (Peèr Ta’hat Efer p.25).



Je ne sais pas ce qu’il en est aujourd’hui, peut-être qu’on ne fume plus du tout dans le beit hamidrash.

Il faudrait déjà se demander s’il est autorisé de fumer dans un Beit Hamidrash, même privé et où l’on serait seul, donc sans tenir compte du désagrément causé aux autres.

Si le Rav Yossef Messas (Mayim ‘Hayim I, §65) l’autorise même dans une synagogue, le Kaf Ha’haim (O’’H §151, sk.10) ne voit pas ça d’un bon œil et ne le tolère (O’’H §151, sk.14) qu’en cas de grand besoin.

Tandis que de nombreux autres décisionnaires interdisent tout bonnement de fumer dans une synagogue (en raison du respect dû au lieu), voir :

Shaarei Tshouva (O’’H §154, sk.20)

Ben Ish ‘Haï (I, Vayikra, §5)

Shéilat Yaabets (II, §9)

Shout Melamed Lehoïl (O’’H §15)

Aroukh Hashoul’han (O’’H §151, 5)

Rivevot Ephraïm (I, §121)

Mishberei Yam (§97)

Sefer Ha’haim (Palacci) (§45, 5)

Yaskil Avdi (IV, §7, 2) et (VIII, §24, 7)

Ye’havé Daat (II, §17).



Cependant, en ce qui concerne un Beit Hamidrash (et non uniquement un Beit Haknesset), la majorité d’entre eux s’accorde à permettre (si ça ne dérange personne).

Voir:

Ben Ish ‘Haï (I, Vayikra, §5),

Ye’havé Daat (II, §17),

Aroukh Hashoul’han (O’’H §151, 5)


et de nombreux autres.

Voir aussi Or Letsion (II, §45, 56).


Mais il est vrai que certains y voyant un problème de manque de respect ou de ‘hilloul hashem seront plus rigoureux.

Concernant les personnes gênées par la fumée, les Poskim discutent du droit de chacun à imposer à autrui d’éteindre sa cigarette qui l’incommode.

Voir :

Tsits Eliezer (XV, §39),

Mishné Halakhot (IX, §161),

et Igrot Moshé (H’’M II, §18).



Pour revenir à la rubrique « rabbins qui arrêtèrent de fumer du jour au lendemain en apprenant que c’est dangereux pour la santé », je citerais rav Yossef Avraham Wolff (fondateur du fameux séminaire éponyme de Bnei Brak) qui demanda au ‘Hazon Ish quelle brakha doit-il dire sur la cigarette avant de fumer et le ‘Hazon Ish répondit : on ne fait pas de brakha sur ce qui est nocif pour la santé.
Rav Wolff arrêta alors de fumer.
(En tout cas, c’est ce qu’on dit –et qui est aussi écrit dans ‘Haïm Lelo Ishoun (p.91), je n’ai pas vérifié si ce rav a rechuté.)

Il y a aussi une lettre du ‘Hazon Ish au Steipler (lorsqu’il était fiancé) dans laquelle il lui écrit qu’il pense que fumer est mauvais pour la respiration et qu’il faut arrêter.

Le Steipler (qui était un grand fumeur) n’a pas arrêté tout de suite, mais l’a fait des années après…
voici un lien pour voir cette lettre (qui a été exhumée assez récemment, suite au décès de la Rabanit Kanievsky), la phrase qui nous concerne est à la fin :
https://s1.kikar.co.il/th/data/auto/addonsmgr/bl/6zgsyqk4__w650h490q95.jpg

Le ‘Hazon Ish faisait donc partie des précurseurs en matière de prévention rabbinique contre le tabac et ses effets nocifs.

Le ‘Haïm Lelo Ishoun (op cit) cite aussi le ‘Hazon Ish (cité dans Maassé Ish tome 6) qui aurait dit que fumer déconcentrerait à 70%.

Je (trouve ce chiffre d'une précision étonnante et je) ne doute pas un instant que les fumeurs le contrediront.
Il devait parler d’une personne qui commence à fumer…
Car un vrai fumeur arrive beaucoup mieux à se concentrer s’il fume.

Voir aussi le Biour Halakha (fin de §63) qui reconnait au tabac cette vertu.

Des rabanim du XIXème siècle (notamment R. ‘Haïm Brisker) encouragèrent même à fumer pour accéder à une grande concentration dans l’étude…
Son élève, le Rav Baroukh Ber Leibovicz de Kamenits, avait l’habitude d’avoir une cigarette en bouche, mais éteinte !
C’était le compromis qu’il avait trouvé pour s’arranger d’une part avec ce que disait son maître –Reb ‘Haim Soloveitshik- qu’on ne peut pas se concentrer et comprendre convenablement sa gmara sans cigarette et, d’autre part, le père de rav Baroukh Ber qui insistait pour que son fils ne fume pas car il avait entendu que c’était mauvais pour la santé.

Drôle de compromis que de garder une cigarette éteinte, mais c’est ce qu’il a fait durant quelques temps. En tout cas, c'est économique et certainement meilleur pour la santé.



Vous vous demanderez pourquoi donc tous ces rabbins avaient-ils commencé à fumer (avant d’arrêter héroïquement en apprenant le danger) ?

Cette question a été répondue par le Shevet Hakehati (I, §332) qui écrit que les cigarettes comportent aujourd’hui des ingrédients nocifs, ce qui n’était pas le cas à l’époque de ces rabbanim qui fumaient.

Il est probable que les ingrédients soient moins naturels de nos jours, mais le danger était déjà là. Permettez-moi donc de douter de cette explication fumeuse.
Je pense que la réponse est en réalité assez simple : à leur époque, ils ne savaient pas que c’était dangereux, où n’y croyaient pas trop.

En effet, il fut un temps où l’on ne considérait pas que fumer nuise à la santé, bien au contraire, nous trouvons que le Pnei Yehoshoua (Shabbat 39b sur Tosfot d’’h Matirin) pensait que c’était bénéfique pour la digestion et autre. (Le Pnei Yehoshoua, Rabbi Yehoshoua Falk, vivait il y a trois siècles, et décéda en 1756).

A la même époque, le Yaabets (Mor Ouktsia §511) écrit lui aussi que le tabac est grandement bénéfique pour la santé. (Le Yaabets est décédé en 1776.) Et son contemporain, le Rav Yonathan Eybeschutz (Bina Laétim, hil. YT §IV, 6), lui aussi souligne l’aspect bénéfique du tabac pour la santé.

Le Pri Megadim aussi (§511, Mish. Z. sk.2) considère que c’est bon pour la santé (il est décédé en 1792).
Voir encore Korban Netanel (Beitsa II, §22, 10).

Idem, plus tard, le Shout Ktav Sofer (§66) et le Aroukh Hashoul’han (O’’H §511, 11).
Voir aussi Shout Levoushei Mordekhai (II, §105) et Zekher Yehossef (§198).

Le ‘Hozé de Lublin (décédé en 1815) répondit à l’homme qui lui confessa être coléreux, qu’il avait tort de ne pas fumer, car fumer calme les nerfs (Esser Orot, daf 49a, §61) (et aussi Erekh Apaïm -Yelin/Breslev §10,15, daf 54a).
[Pas étonnant qu’il pensait cela dans une société où les très nombreux fumeurs s’en abstenaient le shabbat et devaient probablement être assez nerveux à l’approche du Motsaé Shabbat…]

Bref, fumer était normal et la majorité des gens fumait d’après Rabbi Mordekhai Halévi (décédé en 1682) dans son Shout Darkhei Noam (§9).

Au point que lorsque Rabbi Shlomo Shapira de Munkacz (décédé en 1893) arrêta de fumer, on lui en demanda une justification (tant il était évident qu’un Rabbi atteignait de grands niveaux spirituels et accédait à de grandes perceptions kabbalistiques en fumant).
Il répondit qu’il s’était rendu compte que fumer lui faisait perdre du temps d’étude (Beth Shlomo §132).
L’idée se trouvait déjà dans le Dvar Shmouel (Abouab)(§156).

[Une histoire similaire raconte que le rabbi de Belz étant jeune, vit un jour au Beit Hamidrash une personne nettoyant sa pipe avant de la remplir à nouveau et il remarqua qu’il avait réussi à étudier un Daf de Gmara pendant que l’autre faisait le ménage dans sa pipe.
Marqué, il décida ce jour-là d’arrêter de fumer (Ra’hmei HaAv, Gueout §11. Cité par le Taamei Haminhaguim (Sperling) (p.102, §215, fin de note 2) et par le Binian Olam (Avrami) (éd. 1979, §3, p.13 -les nouvelles éditions de ce livre en change toute la structure, je me réfère à l’édition de 1979).

Le Bitoul Torah entrainé par la cigarette est aussi dénoncé par le ‘Hafets ‘Haim dans son Zakhor Lemyriam (§23) et son Likoutei Amarim (§13) où il mentionne les dommages pour la santé, pour le temps et l’argent dépensés en fumant.
Voir aussi Binian Olam (Avrami) (éd. 1979, §3 p.12) et Shout Tsits Eliezer (XV, §39)]

Le Aderet écrit fièrement dans son Nefesh David (p.116, §22) qu’il a appris à imiter son frère en ayant toujours sur lui des allumettes et du tabac afin de pouvoir faire du ‘Hessed avec toute personne (en lui proposant une cigarette et du feu) car c’est un ‘hessed qui peut s’accomplir même avec les riches (n’ayant pas toujours sur eux le nécessaire).
(De nos jours, beaucoup diraient que ce n’est pas un ‘Hessed mais un issour Lifnei Iver ou au moins un issour Messayea.)

La même idée de Tsedaka et ‘hessed avec les riches en distribuant du tabac se trouve dans le Divrei David (de Tshortkov) (p.66 -et cité aussi dans Halakhot Vehalikhot Be’hassidout p.224) ainsi que dans le Kaf Ha’haim (§92, sk.13) mais il s’agit plutôt de tabac à priser.


Malheureusement, il y a chez les rabbins parfois, quelques dignes représentants de la fonction à qui il arrive d’être assez long à la détente en ce qui concerne les découvertes scientifiques.

Un certain scepticisme et une défiance envers tout ce qui est « moderne » participent à ce manque d’empressement à analyser les nouvelles données.
Ajoutez-y le fait qu’ils trouvent dans des sfarim des éléments qui vont dans ce sens et que ça ne se fait pas de dire que le Pnei Yehoshoua se serait trompé (‘has veshalom !), ils préfèrent ignorer les avancées médicales (jusqu’à être rattrapés par la réalité, hélas).

Résultat, les yeshivot israéliennes ont été (et sont encore) plus lentes que le reste de la société (mondiale) à arrêter de fumer.

Le Rav Weiss (Shout Min’hat Asher I, §35) s’en plaint.
Je souligne au passage qu’il parle du « monde des yeshivot » mais que ça concerne essentiellement le « monde des yeshivot » israéliennes et pas les yeshivot américaines. (Ce Rav -habitant en Israël mais qui est américain, aurait pu le préciser.)

Même au XXème siècle, nous trouvons encore des rabbins qui encourageaient à fumer, le Rav Fischer de la Eda Ha’harédit de Jérusalem disait que celui qui fume en semaine mais ne fume pas le shabbat n’a pas à se soucier de problèmes de santé liés au tabac.

Il faut dire que chez les « yeroushalmers », on fume très jeune.

On racontait dans les yeshivot que la raison pour laquelle on ne dit pas le brakha de Shehé’hiyanou sur la première cigarette dépend de la ville ; à Bnei Brak parce que cette première cigarette se fume en cachette aux toilettes…
Tandis qu’à Jérusalem (il faut entendre : chez les yeroushalmers, ceux qui habitent Jérusalem depuis plus de deux siècles), c’est parce que lors de la première cigarette, on ne sait pas encore parler !

[À cette époque, les autres villes « frum », comme Kiriat Sefer (et autres), n’existaient pas encore. On en parlait donc que de ces deux villes.]

En tout cas, comme certains rabbins sont lents à évoluer sur ces points, les yeshivot israéliennes comportaient encore il y a une vingtaine d’années, un pourcentage incroyable d’élèves fumeurs.

Malheureusement, il y a eu des « victimes » -et même parmi les grands rabanim, comme le très grand Rosh Yeshiva, Reb Shmouel Rozovsky, décédé en 1979 (à 66 ans) d’un cancer…

Combien d’autres Talmidei ‘hakhamim ont payé le prix fort ? Les soucis de santé de Rav Rozenberg z’’l n’étaient pas étrangers à ses cigarillos…


Puisqu’on a parlé de la Brakha sur la cigarette, il faut mentionner quelques a’haronim qui en parlent et se demandent s’il convient de réciter une brakha dessus (avant les certitudes médicales que nous connaissons aujourd’hui), comme le Maguen Avraham (§210, sk.9) et le Elia Raba (sk.3).

Et le Ktav Sofer (O’’H §24) qui se demande même s’il ne faudrait pas dire une brakha a’harona ( !) et conseille au moins pour la brakha rishona de s’acquitter par un verre d’eau avant de fumer (comme le faisait Rav Mordekhai Banet).

Mais globalement les poskim considèrent qu’il n’y a pas de brakha à faire –voir :

Shaarei Tshouva (§210, sk.9)

Mishna Broura (§210, sk.17)

Maamar Mordekhai (§210, sk.12)

Shout Hashamayim Ha’hadashim (§21)

Yefei Lalev (§210, sk.2)

Zakhor LeAvraham (I, brakhot, 9)

Mishné Halakhot (IX, §161)

Shout Yehouda Yaalé (O’’H §150)

Mor Ouketsia (§210)

Shout Goren David (O’’H §11)

Shout Maharshag (I, §20)

Maté Yehouda (§210, sk.2)

Ma’hzik Brakha (O’’H §210, sk.4)

Pri Megadim (§210 Eshel Avraham 9)

Mayim ‘Haim (Messas) (I, §65)

Shoul’han Hatahor (Zer Zahav §210, 2)
qui indique tout de même que le Baal Shem Tov faisait une brakha avant de fumer ( !) (sur indication d’Eliahou Hanavi et de A’hia Hashiloni !!), mais que nous ne savons pas quelle brakha il faisait.

[À noter au passage: Eliahou Hanavi, tout en étant prophète, n’a pas su dire au Baal Shem Tov que la cigarette était nuisible et qu’on ne doit donc pas faire de Brakha…
Nous en déduisons donc que ça doit faire partie des exagérations très fréquentes dans certains milieux lorsqu’il est question des exploits du Baal Shem Tov.]


Plus haut, le Shoul’han Hatahor (Zer Zahav §6, 31) mentionne aussi que le Besht faisait une brakha sur sa pipe (ainsi que sur le « tabac à sentir »), mais qu’il ne l’imite pas car il ignore quelle était cette Brakha.
Il précise toutefois qu’un « Talmid ‘Hakham Mouflag » peut se fixer une brakha avant de fumer.

On pourrait imaginer une brakha de l’ordre de Birkat hareia’h, mais ça aussi est exclu par les Poskim. Cf. Baer Hétèv (§210, sk.9) et Aroukh Hashoul’han (O’’H §216, 4).

[Le Baal Shem Tov fumait plutôt la pipe que la cigarette (cf. Shoul’han Hatahor op cit) et il fumait même le matin avant la Tfila, au point que le Toldot Yaakov Yossef en ait été étonné (cf. Shiv’hei Habesht p.73, ot 28. Voir aussi p.137, ot 62).

Le tuyau de sa pipe -ou bien était-ce sa tige (=la partie menant à la tête où se trouve le fourneau, à laquelle est rattachée le tuyau par la jonction entre le tenon et la mortaise) était très long(ue), au point qu’on dit que lors de ses voyages, l’extrémité de sa pipe sortait de la calèche (Shiv’hei Habesht p.254 ot 179), c’était peut-être une disposition prophylactique conseillée par Eliahou Hanavi afin de ne pas incommoder ni nuire à la santé des autres passagers.

Nous trouvons dans les Sifrei ‘Hassidout toutes sortes d’explications mystiques au fait que le Besht fumait et ce qu’il percevait du divin grâce à cet exercice. cf.
Likoutei Méir (§9, 28-30),
Minhag Israel Torah (O’’H §210),
Taamei Haminhaguim (p.102, §215, note 2),
Rosh Bnei Israel (p.371)

et aussi Zohar ‘Haï (parshat Trouma §155)
et dans son Meguilat Starim (daf 14b).

Voir aussi Méir Einei Hagola (§75) qui écrit que Rav Dov Ber Meizles n’a pas voulu devenir ‘Hassid en raison de deux discussions qu’il a eues avec le ‘Hidoushei Harim (1er Rabbi de Gour), l’une d’elle était ce qu’il a dit au sujet de Rav Sim’ha Bunem de Peshis’ha, que lorsqu’il fumait et rejetait la fumée par sa bouche, il avait exactement les mêmes Kavanot que le Cohen Gadol lors des Ketoret à Yom Kippour.

Rav Meizles aurait dit que l’entendre de quelqu’un d’autre ne l’aurait pas éloigné de la ‘Hassidout, mais concernant le ‘Hidoushei Harim, il savait que chaque mot qu’il disait était sérieusement pensé. Un mouvement religieux où l’on pensait sérieusement ceci, lui paraissait effrayant et il préférait s’en éloigner.

(L’autre discussion était au sujet de Rav Yonathan Eibeschütz, au sujet duquel le ‘Hidoushei Harim ne tarissait pas d’éloge et est allé jusqu’à dire que n’était-ce la Ma’hloket dont Rav Eibeschütz a été la victime, il aurait pu grandir encore plus et arriver peut-être au niveau de Rav Sim’ha Bunem de Peshis’ha ! C’en fut trop pour rav Meizles qui ne pouvait souffrir cette comparaison méprisante pour le Rav Eibeschütz.)]


Mais halakhiquement, fumer ne nécessite pas de Brakha et n’est pas totalement comparé à manger.
Ainsi, nous trouvons des Poskim autorisant même à fumer avant d’avoir fait la Havdala [Guinat Vradim (§3, 25), Kaf Ha’haim (§299, sk.65), et d’autres].
Cependant le Kaf Ha’haim Palacci (§31, 7) indique qu’il est tout de même préférable de faire Havdala d’abord.


Je me souviens à l’époque où j’étais à la Yeshiva en Israël, lorsqu’un élève se fiançait, la coutume était qu’il distribuait des cigarettes aux amis qui venaient le féliciter.

Les israéliens distribuaient des cigarettes de la marque Time, les étrangers plutôt des Marlboro (qui coûtaient plus cher).

On pourrait considérer-là un issour de Lifnei Iver Lo Titen Mikhshol.

Je ne sais pas si ça se fait toujours, mais puisque les Poskim interdisent de fumer de nos jours, je trouve le distributeur de Marlboro plutôt « mal barré ».

Le Az Nidberou (IX, §65) n’apprécie pas ce Minhag de distribution de cigarettes, idem pour le Rav Yaakov Kamenetsky (Making of a Godol, p.1093) ainsi que le Rav Ben Tsion Aba Shaoul (‘Hokhma Oumoussar p.221), ils indiquent même d’annuler ce mauvais « Minhag ».

Je sais que le rav Yaakov Benaïm, Rosh Yeshivat Na’halat Moshé, interdisait déjà à l’époque la distribution de cigarettes à ce titre et proposait de les remplacer par des bonbons (que les dentistes reconnaitront moins nocifs que la cigarette, surtout de nos jours où les adultes consomment des bonbons, ce qui était nettement plus rare il y a quelques décennies).

Le Steipler avait l’habitude de fumer juste après la Havdala et offrait une cigarette à chaque Avrekh présent de sa famille, mais uniquement s’il était déjà considéré « fumeur » (Hasteipler p.53).

Le problème de Lifnei Iver concernant la cigarette (ou le briquet prêté) est considéré dans le Kehilot Yaakov (Shabbat, §22) (c’est le Steipler), et dans Peèr Ta’hat Efer (p.148).
Mais pour ceux qui refusent d’y voir un issour défini, il n’y aura pas non plus de issour Lifnei Iver. voir Igrot Moshé (Y’’D II, §49).


Au passage, il convient de souligner que certains voient un problème supplémentaire pour les femmes ;
selon eux, fumer ne sied pas à une femme car ça serait une habitude masculine (Tshouvot Vehanhagot I, §456) (voir aussi Ktav Sofer O’’H §66), ou encore car fumer porterait atteinte à la Tsniout (en se faisant remarquer) (Yaskil Avdi VI, E’’H §1), voire : ça serait de la pritsout et de l’effronterie (Shoul’han Hatahor, Zer Zahav §210).

[Il faut comprendre que ces appréciations se construisent forcément à l’aide des us et coutumes de chaque époque et pays.
Il se trouve qu’avant-guerre, en Pologne (et parfois ailleurs aussi), fumer pour un homme était tout ce qu’il y avait de plus normal, alors que pour une femme, c’était presque la preuve de ses très mauvaises mœurs, on associait la cigarette aux Zonot.
Voir par exemple (-puisque j'ai mentionné récemment sur Techouovt qu'on pouvait déduire des choses de ses livres-) ce qu’écrit I.B. Singer dans Au tribunal de mon père (Stock 1990, p.119).

Je précise au passage qu’il y a trois chapitres qui se retrouvent répétés dans le "second tome", « De nouveau au Tribunal de mon père », avec des reformulations et différences légères de traduction.
Ledit chapitre en fait partie, vous le retrouverez aussi dans De nouveau au Tribunal de mon père (Mercure de France 2003, p.235).

Il mentionne aussi sa cousine Frieda dans Au tribunal de mon père (Stock 1990, p.338), mais il ne l’a pas connue, alors que son grand-frère en parle autrement, en la nommant Fradl (c’est le diminutif de Frieda) dans son livre D’un monde qui n’est plus (§13, Denoel 2006, p.181-182), et en soulignant que cette cousine était « la brebis galeuse de la famille » et qu’elle fumait ! Il la définira même comme étant une « demoiselle fumante » (p.182).]


Bref, pour conclure, il est malsain ET « mal-saint » de fumer, selon de nombreux poskim il est ASSOUR de commencer à fumer et il faut faire ce qu’on peut pour se sevrer.

[Selon certains (Shevet Halévy X, §295), ce sevrage devra être progressif, mais pour d’autres (Or Letsion ‘Hokhma Oumoussar, p.221) il devra impérativement être brutal et catégorique, sans quoi il serait voué à l’échec et entrainerait la rechute.
Je laisse aux médecins et spécialistes le soin de statuer et arbitrer entre ces « conseils » rabbiniques dont nous retiendrons simplement que, du point de vue de la Halakha, il n’est pas absurde de se lancer dans un sevrage progressif, même si l’on considère que chaque cigarette pourrait représenter un Issour Torah.]


La raison pour laquelle plusieurs rabanim fum(ai)ent se trouve simplement dans leur ignorance (justifiée ou non) du danger lié à la cigarette.

Qu’Hashem nous envoie une bonne santé à tous jusqu’à 120 ans et que tous nos soucis partent en fumée.

PS: Je ne me relis pas, c'était déjà assez long à écrire, veuillez excuser les probables fautes, merci.
Pire encore, je me suis laissé entrainer par mon clavier et j'ai l'impression d'être revenu sur des sujets après de longues parenthèses, je crains donc qu'il soit parfois difficile de garder le fil.
Dans ce cas, n'hésitez à entreprendre une seconde lecture, ça vous prendra toujours moins de temps que ce que m'a pris la rédaction d'une si longue réponse :)
aralé
Messages: 143
Kvod Harav Wattenberg,

Votre réponse concernant le fait de fumer est un véritable traité encyclopédique!

Je me souviens qu'on avait très diplomatiquement posé la question ,au très regretté Rav Rozenberg, de la permission de fumer alors que c'est dangereux pour la santé.

Il a bien pris la chose, et nous a répondu par une question. Faut-il interdire le tchoulent et la dafina parce que c'est gras et que ça bouche les artères ?

Les grands fumeurs sont addicts, mon père zal en est mort.

Concernant le tabagisme passif, il est admis que ça va au delà de la gène et du dérangement et que ça affecte la santé. Donc celui qui fume met non seulement sa santé en danger mais aussi celles des autres (dans un espace fermé).

Mettre la santé des autres en danger (même si c'est un safek) ça doit peser lourd halachiquement parlant ?

Merci pour vos réponses si instructives
Cheela-techouva
Messages: 119
Merci Rav pour cette techouva passionnante !
aribed
Messages: 21
Bonjour Kevod Harav,

Questions pratique:
Est il autorisé de vendre des cigarettes à des gens qui fument déjà?
Merci beaucoup
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
A Cheela-techouva :

Citation:
Merci Rav pour cette techouva passionnante !

Avec plaisir ! 😊
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
A Aribed:

Citation:
Est il autorisé de vendre des cigarettes à des gens qui fument déjà?

Oui.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
A Aralé :

Citation:
Votre réponse concernant le fait de fumer est un véritable traité encyclopédique!

Content que mon « traité » vous plaise 😊


Citation:
Je me souviens qu'on avait très diplomatiquement posé la question ,au très regretté Rav Rozenberg, de la permission de fumer alors que c'est dangereux pour la santé.

Il a bien pris la chose, et nous a répondu par une question. Faut-il interdire le tchoulent et la dafina parce que c'est gras et que ça bouche les artères ?


C’est une réponse sympathique, mais avec tout le respect dû au Rav Rozenberg, il y a une différence fondamentale entre les deux ; car il est évident qu’on interdirait aussi la Dafina à celui qui en abuserait au point qu’elle mette sa vie en danger.

Jusqu’aux dernières nouvelles, le risque de mourir d’overdose de Dafina est très rarement d’actualité (et ne concernerait que ceux qui seraient déjà atteint gravement -auxquels effectivement, le médecin interdit la Dafina).

Quant à la cigarette, s’il s’agissait d’en fumer qu’une demie tous les six mois, là aussi la dose ne serait pas dangereuse et personne n’en ferait un plat.

Donc oui, la Dafina (ou le Tshoulnt) c’est gras, ou encore un bonbon, ça contient du sucre ( !), mais tant que ça reste dans des doses qui ne représentent pas un risque évident, on ne s’en affole pas.

Citation:
Les grands fumeurs sont addicts, mon père zal en est mort.

Et ça n’est pas le seul.

Citation:
Concernant le tabagisme passif, il est admis que ça va au delà de la gène et du dérangement et que ça affecte la santé. Donc celui qui fume met non seulement sa santé en danger mais aussi celles des autres (dans un espace fermé).
Mettre la santé des autres en danger (même si c'est un safek) ça doit peser lourd halachiquement parlant ?


Effectivement, mais il faut tenir compte, là aussi, de la « dose ».
Si quelqu’un se trouve une fois l’an à proximité d’un fumeur, il en survivra. Le souci c’est s’il est fréquemment en contact avec des fumeurs.

Or pour que cela pèse "lourdement" dans la balance halakhique, il est impératif que l’action soit nocive de par elle-même.
Une personne qui respirerait chaque jour la fumée de personnes différentes, serait la première « responsable ».
Les milliers de fumeurs qui auront contribué à lui noircir les poumons n’auront -à titre individuel- pas condamné cette personne ; si elle n’avait respiré ces fumées qu’un seul jour, elle s’en serait remise.

Néanmoins, ce n’est pas pour autant que cela ne pèserait rien dans la balance halakhique, c’est juste qu’on ne peut pas parler de responsabilité aussi grave que lorsqu’il s’agit de fumer soi-même (car là, c’est toujours le même corps qui est endommagé).

Citation:
Merci pour vos réponses si instructives

You’re welcome.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
Au sujet de ce que j’ai écrit plus haut que des Rabbanim préconisaient une petite cigarette pour favoriser la concentration dans l’étude, j’ajoute encore ce qu’a écrit la maman du Rabbi de Loubavitch dans ses mémoires, en parlant de son mari (Rabbi Lévi Its’hak Schneersohn) qui avait une technique de préparation avant d’écrire ses ‘Hidoushim:

« La manière de procéder de mon mari était la suivante. Il fumait d’abord une cigarette... Après avoir fumé, il s’enfonçait dans ses pensées et c’est seulement après cela qu’il commençait à écrire ». (Mémoires de la Rabbanit Hanna -un peu avant la note 187. Il n’y a pas de page à indiquer, car étrangement, ce livre n’a encore jamais été publié en français si ce n’est sous forme d’épisodes. Avis aux amateurs.)
HaimF
Messages: 3
Bonjour Rav Wattenber, merci beaucoup pour vos réponses très détaillées.

Qu’en est-il de fumer à Pourim? Je ne suis absolument pas fumeur mais j’aime bien fumer un cigarillo ou une ou deux cigarettes à Pourim, de ce que vous avez détaillé j’en déduis que ce n’est pas un problème, est-ce correct?

De plus, qu’en est-il de donner des cigarettes à des gens, surtout à des fumeurs? Est-ce qu’on peut faire une différence entre s’il va la fumer pour le jour de Pourim ou plutôt par réflexe de fumeur? Est-ce qu’on a le issour de lifne iver?

Merci beaucoup,
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
Citation:
Bonjour Rav Wattenber, merci beaucoup pour vos réponses très détaillées.


Avec plaisir.

Citation:
Qu’en est-il de fumer à Pourim? Je ne suis absolument pas fumeur mais j’aime bien fumer un cigarillo ou une ou deux cigarettes à Pourim, de ce que vous avez détaillé j’en déduis que ce n’est pas un problème, est-ce correct?

En effet, fumer une ou deux cigarettes une fois par an ne peut pas aisément être catalogué dans un Issour.
Il faut savoir se méfier et ne pas y prendre goût, mais celui qui fumera 20 cigarettes en 10 ans ne devrait pas trop en pâtir et, partant, ne devrait pas être en infraction de Venishmartem.
Je le comparerais volontiers à la Dafina et au Tshoulnt de Rav Rozenberg (voir plus haut).

Citation:
De plus, qu’en est-il de donner des cigarettes à des gens, surtout à des fumeurs? Est-ce qu’on peut faire une différence entre s’il va la fumer pour le jour de Pourim ou plutôt par réflexe de fumeur? Est-ce qu’on a le issour de lifne iver?

Je réponds à cette question ici : https://www.techouvot.com/viewtopic.php?p=55263#55263
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
Plus haut j'écrivais:
Citation:
La raison pour laquelle plusieurs rabanim fum(ai)ent se trouve simplement dans leur ignorance (justifiée ou non) du danger lié à la cigarette.

J'indique encore à ce sujet le Rav Yossef Messas qui dans son Otsar Hamikhtavim (III, §1907) explique qu'on ne doit pas toujours tenir compte des mises en garde des médecins qui aiment bien faire tout un plat d'une très lointaine inquiétude.

Ils disent qu'il y a un danger pour les futurs enfants lorsque les parents sont en famille et déconseillent donc d'épouser sa nièce -ce qui est pourtant conseillé par 'Hazal (Yevamot daf 62)- alors que nous voyons bien que tout le monde le fait depuis des siècles et il ne nous est rien arrivé.
Afin de prouver le faible niveau de conviction des médecins eux-mêmes, Rav Messas précise qu'il connait un médecin à Oran qui lui avait dit faire partie de ceux qui s'opposent aux mariages consanguins car il y aurait un danger etc., mais finalement ce même médecin a épousé sa propre nièce et tout va bien pour eux.

Idem, ajoute-t-il, les médecins ont pris plaisir à faire tout un drame autour de la cigarette, pourtant, beaucoup fument cigarette après cigarette et il ne leur arrive rien du tout...

Bref, Rav Messas (décédé en 1974) ne croyait pas trop au danger de la cigarette.
Reb Manès
Messages: 33
Aucun interet particulier pour les lecteurs du forum, mais dans le premier post passionnant (et fleuve) il faut corriger : D’un monde qui n’est plus est un livre de Israel Joshua Singer, pas d'Isaac Bashevis Singer.
Kol touv.
Rav Binyamin Wattenberg
Messages: 6335
Je cite:
Citation:
dans le premier post passionnant (et fleuve) il faut corriger : D’un monde qui n’est plus est un livre de Israel Joshua Singer, pas d'Isaac Bashevis Singer.


Je sais bien, aurais-je attribué ce titre à Isaac ?

Je n'ai pas la force de tout relire mais je vois une mention du livre "D’un monde qui n’est plus" dans mon long post dont vous parlez, et je dis bien qu'il s'agit d'un titre de son grand frère, c'est-à-dire de I. Joshua.
Je me cite:

"Il mentionne aussi sa cousine Frieda dans Au tribunal de mon père (Stock 1990, p.338), mais il ne l’a pas connue, alors que son grand-frère en parle autrement, en la nommant Fradl (c’est le diminutif de Frieda) dans son livre D’un monde qui n’est plus (§13, Denoel 2006, p.181-182)..."

Aurais-je loupé quelque chose?
Pouvez-vous indiquer la phrase incriminée par copié-collé? ça me faciliterait les choses. Merci.
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